Le soleil chatouillait ma peau, me réchaufant délicatement. Il était sans doute l'heure de se lever... Bientôt...

Every me and every you...

Le réveil s'était accordé à mes pensées. Quel drôle début de journée. Le musique du réveil n'était pas désagréable et je la laissais sonner en m'étirant.
Il était temps que j'accomplisse ce pourquoi j'avais été envoyée à Fell's Chruch : y répendre la débauche. Le commencement le plus logique (et le plus facile) était auprès des jeunes... Un sourire étira mes lèvres. Il fallait bien commencer par quelque chose.
Je me levai enfin encore étourdie de ma nuit, laissant la musique du réveil tandis que je me préparai.
Je pris la voiture et conduisis jusqu'au lycée de cet agréable Fll's Chruch. Je me garai un peu en retrait, descendis de la voiture et m'appuyais contre un arbre, à l'ombre de ce soleil qui brûlait déjà. L'interminable défilé d'élèves commença. Du déjà vu, dans une autre ville, une autre époque... Le principe restait le même, les gens étaient tous semblables. Des hormones les rendant faibles, un cœur les rendant touchables, une tête qui ne leur servait pas, un instinct de survie inexistant. En somme, des humains torturés par leur corps et leur âge, torturés par eux-même. La vie pouvait être si simple lorsqu'on la prenait autrement.
J'avais de grosses lunettes noires et je n'avais pas osé une tenue trop provocatrice. Mais ce n'est pas pour autant que j'évitai les regards insistants ou les sifflements admiratifs et rébarbatifs que je balayai en détournant la tête. J'étais prête à exploser de rire de tant d'attention lorsque je LE vie. Mon rire se stoppa net et mes traits se tirèrent. Je fus heureuse de porter des lunettes aussi noires que mes cheveux. Lui m'avait déjà repéré et s'avançait, comme ma pénitence.

**Merde !**

Je connaissais son passé et en me faisait « muter » ici, j'avais été sûre de ne jamais le voir... Et bien, je m'étais trompée. Pourtant je le connaissais, j'aurais pu prévoir...
Plus il se rapprochait, plus je paniquais. Fuir ? Impossible. Sourire ? Encore pire. Et pourtant, je vivais pour mentir, rassurer et nuire aux hommes. Mais pas lui...
C'est ainsi que souriante et ne laissant rien transparaître, j'accueillais mon ancien meilleur ami, mon ancien amour et ancien amant... Pourquoi ma gorge se serrait-elle ainsi ?!

-Ça fait des siècles Louise ! S'exclama-t-il en arrivant à mon niveau.

Mon nom dans sa bouche restait inchangé. Lui semblait aller mieux que la dernière fois. Plus sur de lui. Rétablit... Je pinçai les lèvres de manière ironique et trouvais la fore de lui répondre en souriant.

-Quel euphémisme ! Tu n'as pas vieillis, le taquinai-je. Qu'est-ce... Que fais-tu là... ? Demandai-je perdant peu à peu de mon assurance.

Je ne m'étais pas préparée à ça. En fuyant ce beau matin d'hiver, je m'étais jurée de ne jamais le revoir...
Je faisais pitié comme succube...

Il semblait rayonnant. Une crampe me tordit le ventre : il n'avait pas eu besoin de moi pour réussir... Moi j'avais eu besoin de lui, mais j'avais fui. Il brandit triomphalement une liasse de papier sous mon nez et malgré la tension qui saisissait tout mon corps, j'éclatai de rire. Il n'y avait que lui pour avoir de telles idées. S'inscrire au lycée... pour ma part, j'avais privilégié le bar de strip tease mais bon, chacun son truc... Je savais que c'était sa ville natale mais je savais aussi ce qui lui était arrivé ici et si tel avait été mon passé, jamais je n'y aurais remis les pieds dedans. Malheureusement, c'est bien ce que j'étais en train de faire, remettre les pieds dans le passé, avec Stefan. Le passé m'avait toujours hanté, celui-là le premier. D'un air absent qu'il ne pouvait pas voir à travers les lunettes, je le dévisageai. C'était bien son regard qui m'avait fait craquer en premier. Je me sentis divaguer et je secouai la tête pour revenir à mon tourment présent. Pas besoin d'y rajouter le passé...

-Ou alors, on se fait discrète et impersonnelle en tant que strip-teaseuse et personne ne remarque que vous ne vieillissez pas ! Répondis-je avec un maximum d'auto-dérision et un minimum d'amertume.

Je ne pus m’empêcher de lui sourire. Un sourire tendre, et gentil, comme je n'avais pas l'habitude de servir. Mais avec lui, ça devenait naturel. Nous avions eu une belle relation, presque maternelle pour moi, presque fraternelle pour lui. Mis à part ce fameux soir... et mes foutus sentiments. Mais ça... Ça il ne doit pas le savoir au prix de ma tête ! Pour lui nous avions dérapé. Et... Je m'étais enfuie. Mais bon ! Il semblait avoir oublier. En même temps Stefan était l'homme le plus gentil et le moins rancunier que j'avais connu, envers moi en tout cas. Je regardais le portail du lycée rapidement puis reportai mon attention sur lui.

-J'ai été mutée ici, dis-je rapidement pour répondre à sa question.

Je savais qu'il n'aimait pas mon statut. Qu'il n'aimait pas le sien non plus. Et que ce que je faisais lui semblait très peu catholique et d'autant moins bien. Nous nous étions souvent disputé sur le mal et le bien des choses. Je ne souhaitais donc pas m'éterniser sur le pourquoi de ma présence puisque tout en était lié.

-Tu ferais peut être bien d'y aller... Ça serait nul d'arriver en retard pour ton premier jour, non ? Suggérai-je.

J'avais beaucoup de chose à lui dire mais en même temps très peu étaient de circonstance. Je commençais à étouffer sous son regard, je ne savais pas ce qu'il pensait de moi ni ce qu'il était devenu et je m'en inquiétais. Qu'allions-nous devenir ?

Le regard qu'il posait sur moi me brûlait. Il n'était plus aussi naturel qu'avant. Du moins, JE ne le ressentais pas de la même façon. Rien que le fait qu'il se tienne, en face de moi alors que j'avais tout tenté pour l'oublier ravivais dans ma mémoire bons nombres de souvenirs et pas tous de circonstances... une partie de moi s'en voulait de penser ça. Tout d'abord parce que j'étais un démon. Et puis aussi parce que j'étais partie pour éviter les remords. Et voilà que les remords venaient à moi ! Le contraire aurait été trop facile !

- Comme la fois où tu es partie ?! En tous cas, la débauche est partout ici. Au point où parfois je préférerais ne pas avoir d'oreilles, je te l'assures !

Le début de la phrase avait été glissée avec subtilité mais le résultat était le même, je m'étais prise une claque. Une douche froide même. Malgré la chaleur ambiante, j'eus la chair de poule et les poils de ma nuque se hérissèrent. Je ne sus quoi répondre car en réalité, je n'avais rien à ajouter. Il avait tout dit. Et même si je lui en voulais d'avoir sortis ça, je savais qu'il avait raison. Mais je ne pensais pas être prête à l'entendre. Pas de si tôt... Encore un ou deux siècles...
J'ouvris la bouche mais la refermai ensuite. Ma répartie légendaire s'en était allée avec mon assurance. Il m'énervait d'avoir cette emprise, ce pouvoir de tout réduire en moi à l'état de néant. J'avais l'impression de n'être plus qu'une chiffe sous son regard. Et je n'aimais pas ça du tout.

- Considères moi comme déjà dévergondé. Je sèche le premier jour pour rattraper le temps perdu avec toi. Alors, tu allais faire quoi ce matin ?!

En effet il avait rangé ses dossiers et se tenait là, prêt à sécher ses cours. Malgré ma mauvaise humeur du moment il m’arracha un sourire.

-De toute façon, tu n'as pas besoin d'apprendre, tu sais déjà tout. Rétorquai-je moqueuse avec une moue amusée.

Pour reprendre contenance, je me relevais de l'arbre contre lequel j'étais appuyée et me dirigeais vers ma voiture juste à coté. D'un coup de clé, je l'ouvris et enfin, je levais mon visage vers lui.

-Tu veux aller où ? Je t’amène. Pour répondre à ta question, je ne comptais rien faire ce matin.

J'avais hésité à ramener mon départ sur le tapis. Mais vu que lui même avait changé de sujet, peut être n'était-ce pas important pour lui. Au final : il ne m'avait pas posé la question vraiment directement !